En évoquant dans mon dernier article (l’entreprise libérée) le thème de l’entreprise libérée, j’ai promis à mes lecteurs fidèles et attentifs de revenir sur la question de la responsabilité.
Commençons par une définition :
«responsabilité» vient du latin respondere, qui signifie «répondre».
«Vous ferez damner votre bon maître et vous en répondrez devant Dieu».
Répondre de ses actes, donc, ou «assumer ses responsabilités».
Chacun est responsable de ce qu’il dit et de ce qu’il fait : c’est sa responsabilité individuelle telle qu’on la comprend habituellement.
Mais, de façon moins visible, de ce qu’il laisse dire et laisse faire : c’est la condition pour un bon fonctionnement en équipe.
Être responsable, c’est accepter les conséquences de ce que l’on fait. Je dirais donc que c’est l’opposé d’être soumis qui supprime la qualité d’auteur de ses actes.
Enfin, ça signifie s’exprimer sans détours, sans termes vagues ou visant à se défausser sur autrui.
Nous connaissons tous ce genre d’attitudes (souvent pour les avoir pratiquées soi-même !) :
– C’est la faute des autres (ils sont trop nuls) / du matériel (pourri) / du Système !
– Je n’y peux rien
– C’est injuste
– Je n’ai pas de chance
responsabilité et comportement
Si on commence par se trouver des excuses, c’est qu’on ne veut pas identifier sa part de responsabilité.
Admettre que les difficultés ne sont ni la faute d’autrui ni des contingences extérieures est un signe d’une prise de conscience.
Reste encore à faire autre chose que se blâmer soi-même, ce qui est une autre façon de s’excuser en ne réglant rien (le mea culpa où l’on invoque sa nature, son caractère, d’un définitif «je suis comme ça»).
Rejeter la faute ou jouer à Caliméro sont des moyens de l’inaction.
Chers lecteurs je ne suis pas en train de faire de la morale ou une dissert’ de philo, et voilà où je veux en venir :
La responsabilité, c’est une force, c’est un moyen d’action
Se plaindre, blâmer les autres, serait s’éloigner encore plus de la résolution d’un problème donné, parce qu’alors on perd tout le contrôle, en remettant la potentielle solution entre les mains d’une tierce personne.
Au lieu de se décharger de son pouvoir en reportant la responsabilité sur l’extérieur, en reconnaissant les erreurs comme siennes, on garde le contrôle.
Une distinction est faite depuis l’Antiquité entre ce qui arrive (qu’on ne choisit souvent pas) et notre manière d’y répondre. On dispose toujours*1 du pouvoir de choisir notre réponse. Notre réaction est du domaine de notre responsabilité.
Là je vais vraiment vous donner le frisson de la copie de philo, en rappelant que les Stoïciens (trop tendances en ce moment dans le monde de management) distinguaient le propathos(réaction instinctive) de l’eupathos(sentiments issus d’un jugement réfléchi).
Ex. de propathos : «put***, mais j’y peux RIEN, môa ! C’est les commerciaux qui assurent pas !!!»
Ex. d’eupathos : «je dois me concerter avec le service commercial pour trouver une nouvelle façon de faire, sinon le prochain trimestre ne sera pas plus brillant»
Choisir sa réponse
Quand on détermine soi-même ce qui se passe dans son esprit, on reste acteur, plutôt que subir.
Dans toute contrariété, erreur, échec, il y a une opportunité de s’améliorer.
C’est le moment de prendre conscience de l’origine précise des défaillances, et d’y remédier, pour éviter la répétition de cette situation à l’avenir.
Quand il s’agit d’apprendre de ses erreurs, on a toujours plus de capacités que ce qu’on croit au premier abord.
Pour lui, même la cause la plus pourvoyeuse d’excuse (une tempête qui provoque l’échec d’une mission), ne dispense pas de responsabilité. Sa façon de penser est :
comment en tirer une leçon pour progresser ?
quel plan fonctionnerait même s’il y avait un phénomène météo violent ?
Responsabilité et la notion de choix
Responsabilisation et diffusion du pouvoir
La responsabilité n’est pas attachée au pouvoir hiérarchique, mais un dénominateur commun.
Ce qui m’intéresse, dans l’exemple des entreprises libérées, que j’évoquais la semaine passée, c’est qu’elles sont particulièrement aptes à développer les capacités des collaborateurs, à les responsabiliser.
Les managers y ont compris qu’on ne peut pas motiver ses collaborateurs en les culpabilisant. D’une forme de contrôle-sanction (atteinte des objectifs), on passe à un modèle dans lequel les managers identifient des difficultés spécifiques et aident leurs équipes à les dépasser.
On demande aux managers de faire monter en compétences les équipes, de les aider à exprimer leurs talents, à être plus autonomes et donc spontanément plus conscients de leurs responsabilités.
Je pense que cet «empowerment» est une source essentielle de motivation, un thème que j’évoquerai prochainement.
Salutations maîtrisées,
Thomas
(qui est toujours prêt à répondre)
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«Un siècle de recherche en psychologie n’a pas suffi à percer l’énigme de la motivation».
Ainsi s’ouvrait le grand dossier consacré à cette question par le magazine Sciences Humaines, en 2015.
Sans prétendre avoir résolu l’énigme, je vous propose une perspective originale sur cette question essentielle pour tous les dirigeants.
Mais enfin qu’est-ce qu’ils veulent ???
M. LEBOSSE est un patron avisé.
Pour obtenir une implication idéale de ses employés, il sait bien qu’il doit utiliser autre chose que la carotte ou le bâton.
Bien sûr il y a toujours une reconnaissance par le salaire, et il est tout aussi certain que la contrainte reste une option disponible.
Mais LEBOSSE a une autre idée sur la question : les gens doivent simplement avoir un bon état d’esprit. Ils peuvent tous se révéler excellents s’ils se mettent à croire en eux-mêmes.
Il a lu un bouquin de Carol Dweck, une chercheuse américaine très réputée.
C’est évident : quand les gens prennent conscience de leur potentiel trop longtemps étouffé par un état d’esprit «fixe», ils changent.
Pour l’entreprise, c’est un avantage énorme.
D’ailleurs c’est exactement ce qui s’est passé avec le nouveau, Lucas, à la suite de son premier entretien d’évaluation.
…Mais pourquoi ça ne marche pas avec Clément ?
-Il le fait exprès ?
-C’est un crypto-syndicaliste ?
-Un parasite rétif à la technique de motivation idéale ?
Cette fois on a trouvé la bonne technique…
L’idée d’autonomie est dans l’air du temps pour diverses raisons :
LEBOSSE a décidé d’en parler avec son ami LETAULIER. Lui aussi dirige une entreprise, il peut comprendre.
Mais LETAULIER n’en revient pas de cette théorie de l’état d’esprit de réussite. Il n’a jamais entendu parler de Carol Dweck !
Évidemment on n’en est plus au stade «la carotte et le bâton». Mais la solution universelle, il la connaît.
Parce qu’il a compris comment fonctionnent les gens.
En fait, le secret, c’est le sentiment d’appartenance.
C’est simple : les gens ont besoin de faire partie d’une équipe, d’être acceptés, reconnus, de partager des normes et des codes.
D’ailleurs deux chercheurs américains très réputés, Edward Deci et Richard Ryan, l’ont clairement démontré. Ce qu’il faut faire, c’est bien souder les équipes.
D’ailleurs ça marche…
…enfin, pas toujours à vrai dire.
On pourrait multiplier les préconisations par le nombre de théorie de la motivation :
· L’idéal : les gens s’investissent fort dans quelque chose de grand
· Imitation : les gens sont motivés par des exemples qui les inspirent
· Environnement : les gens veulent des conditions de travail agréables
· Reconnaissance : les gens ont besoin d’être félicités pour ce qu’ils font bien
· Tactique : les gens ont besoin de se renforcer par l’atteinte de buts intermédiaires
· Enfin, le renouvellement : rompre la monotonie par d’incessantes nouveautés
· …
La liste est loin d’être exhaustive, et je m’abstiens d’évoquer les quelques facteurs qui me semblent fournir les meilleurs illusions de «solution universelle».
«les gens», ça n’existe pas
À force de parler, par commodité, de groupements comme «les opérateurs», «les cadres» ou même «les équipes», on pourrait oublier que ce sont seulement des concepts.
«Les cadres» n’ont pas de capacités, d’intentions ou de comportements définis. «Les gens» ne réagissent pas d’une manière à telle injonction et d’une autre manière à telle intervention.
Il n’y a en réalité que des individus, et seul l’individu a la capacité de penser, d’agir, et de s’exprimer.
C’est ce que je crois et que je mets en application dans mon travail : une vision du management qui est fondée sur la personne humaine.
Chaque individu, et cela vaut évidemment aussi pour la personne du dirigeant, a ses propres aspirations, sa sensibilité, son système de pensée.
Les motifs qui animent les individus sont multiples, changeants et complexes.
Une vision mécaniste et newtonienne ne convient donc pas pour envisager la relation humaine. On ne peut pas évacuer cette complexité, ni faire l’économie de la relation.
Je pense que tout se joue dans la relation.
Un contact sincère et sans a-priori permet de comprendre la personne, ses perceptions et ce qui l’engage dans l’action.
Établir une authentique relation est autrement plus favorable pour l’entreprise qu’appliquer des astuces de motivation.
«Motiver les gens» d’un point de vue surplombant, comme cela se fait encore dans de très nombreuses entreprises revient à mettre des rustines et croire qu’on va regonfler «les équipes» à bloc.
Grave illusion, à mon sens, c’est pourquoi j’approfondirai ce thème dans d’autres articles.
Très personnellement,
Thomas
(qui aime aussi les théories sociales des chercheurs américains)
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J’ai entendu si souvent quelqu’un
me dire qu’il se mettait à son compte pour enfin trouver la liberté
d’action qui lui avait toujours manqué en tant que salarié…
…Comme s’il y avait d’un côté l’entreprise qui serait
l’équivalent du goulag équipé d’une machine à café, et de l’autre le freelance fier
et indépendant, héros postmoderne qui fend de son menton volontaire les nuages
de la conjoncture économique.
Il me semble évident que l’autonomie, et, pour être plus
exact, l’autonomisation des individus,
est un enjeu qui est essentiel quelle que soit la situation de travail.
Et surtout, qui va beaucoup plus loin qu’une idée de
préférence personnelle : je crois qu’il s’agit en fait d’un mouvement de
fond, qui touche toute la société.
Ce n’est encore qu’un des malentendus qui entourent cette
notion, que je vais évoquer ici.
Traduction et résumé : l’interdépendance est au bout du chemin de l’autonomie
L’idée d’autonomie est notamment dans l’air du temps pour diverses raisons :
Technologique : les moyens de communication actuels facilitent le travail à distance
Organisationnelle : le management participatif implique plus de délégation et d’écoute
Générationnelle : l’autoritarisme, la directivité ne sont plus acceptés
Fonctionnelle : introduire plus d’autonomie produit un gain d’efficacité mesurable
Culturelle : la tertiarisation de l’économie aboutit à une économie de la créativité
Réactionnelle : l’absurdité de la culture du présentéisme produit son antidote
Systémique : au-delà d’un certain niveau de complexité, l’autonomie locale est nécessaire
J’entends par
autonomie plus que sa définition classique, dérivée des racines grecques autos (soi-même) et nomos (règles) : faculté de se gouverner soi-même, en se
donnant ses propres règles de conduite, sans être dominé par une autorité
extérieure.
DES JOUEURS, PAS DES PIONS
Que signifie «autonomie» pour les salariés, dans le cadre
d’une entreprise ?
Une bonne partie de la réponse est donnée de manière très
concrète par l’exemple de
FAVI, l’entreprise de Jean-François Zobrist, que j’ai évoqué dans un billet
de blog précédent.
Auto-organisation : la manière de
procéder est la responsabilité des opérateurs, le dirigeant ne doit pas
l’imposer ;
Auto-direction : reconnaissance des
collaborateurs comme individus
compétents, pour agir ou pour apprendre, et légitimes dans les décisions
qu’ils prennent pour satisfaire les clients ;
Auto-contrôle : l’autonomie n’est réelle
que si la confiance est étendue à la vérification de la qualité.
L’idée est que l’acteur qui n’est pas reconnu se
désinvestit, ce qui impacte la qualité de son travail et les résultats de
l’entreprise.
À l’inverse, faire confiance aux acteurs et permettre la
prise d’initiative améliore l’implication, densifie les liens entre
collaborateurs, améliore la communication, l’efficacité, et le bien-être au
travail.
SE PRÉOCCUPER DES MOYENS
Je tiens aussi à faire une mise au point sur un quiproquo
majeur qui pourrit la perception de l’autonomie : l’autonomie se signifie surtout pas qu’on se fiche des moyens tant que
le résultat est au rendez-vous.
Daniel Pink, dans son best-seller sur le management «La
vérité sur ce qui nous motive», écrit il y a 10 ans, faisait l’éloge du
modèle ROWE (results-only work
environement), un style de management uniquement centré sur les résultats.
«Tout ce qu’on leur
demande est que le travail soit fait», affirmait apparemment la direction
de la grande enseigne américaine BEST BUY. Sauf qu’en réalité… cette
société a vite abandonné
ce modèle totalement contre-productif.
Ne se focaliser que sur les résultats engendre non-seulement
toutes les dérives du court-termisme
(c’est-à-dire la pire chose à faire s’il s’agit de pérenniser l’activité d’une
entreprise), mais en plus ça revient à se priver de la compréhension de
l’activité.
Il me semble qu’il faut à l’inverse s’intéresser de près aux moyens mis en œuvre pour atteindre les résultats : non les dicter, mais les comprendre.
L’inventivité et le pragmatisme qui caractérisent la libre
détermination des moyens génèrent à peu près tous les échanges qui font vivre l’entreprise.
…Ce n’est pas en faisant du team-building à VTT lors du séminaire annuel qu’on créera ce type
de relations.
Cap sur l’autonomie…
DÉCLARATION D’INTERDÉPENDANCE
Gagner en autonomie ne signifie pas faire cavalier seul.
L’autonomie est une interdépendance, non une indépendance.
Je veux là encore dissiper un malentendu :
l’autonomie n’est pas une donnée («mon employé est-il assez autonome ?»)
mais plutôt
un terrain
d’action pour le manager («comment développer l’autonomie des
collaborateurs ?»)
Souhaiter une organisation dans laquelle les acteurs soient
plus autonomes implique nécessairement d’être décidé à développer les capacités
des collaborateurs, c’est-à-dire de les aider à progresser dans leurs
capacités individuelles.
C’est donc une manière d’être en relation :
échanger sur les moyens,
faire des points d’étape,
faire sortir les difficultés en temps utile…
Aider signifie apprendre à l’acteur à faire par
lui-même : c’est la logique de
responsabilisation qui relève en fait du bon sens universel. L’encyclopédie
antique Chinoise, le Guanzi,
comprenait déjà ce conseil : «Si vous prévoyez pour dix ans, plantez un
arbre ; pour cent ans, éduquez le peuple.»
Aussi, se préoccuper du développement des capacités des
collaborateurs est au moins aussi important pour l’entreprise actuelle
qu’atteindre des résultats.
L’extension de la responsabilité et des capacités des
acteurs entraîne automatiquement la multiplication
des relations.
C’est un moyen pour renouveler les liens dans l’entreprise,
en quantité et en qualité.
Je dirais en conclusion que la
notion d’autonomie est beaucoup plus fructueuse qu’on ne pense souvent.
De plus, elle permet de reconsidérer les questions de responsabilité, d’autorité, de contrôle, de motivation… Elle conduit ainsi à une réflexion sur la maturité, la prise de risque, l’apprentissage…
Et je suis persuadé que les avantages que l’autonomie apporte aux
individus s’étendent à l’organisation dont ils font partie.
En toute interdépendance,
Thomas
(qui
peut répéter si vous avez mal entendu)
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